Variations des possibles autour de l’habitat de demain …
La soirée inspirante du 29 janvier a réuni presque 60 personnes autour du sujet de l’habitat. Trois éclairages très complémentaires sont venus nourrir la réflexion des participants autour de nos futurs modes d’habiter.
Retour sur ces interventions et leurs pistes d’actions possibles et enthousiasmantes de nos 4 conférencière et conférenciers ….

DES CRISES DU LOGEMENT – Antoine Pauchon, IDHEAL
Ce n’est une crise mais bien des crises qui traversent celle du logement d’après les études et les analyses d’IDHEAL.
Antoine Pauchon nous a d’abord parlé d’une crise de l’accès au logement abordable pour tous et à questionner la promesse de la propriété spéculative. Son exposé nous a montré d’abord que le dérèglement climatique remettait en cause la sécurité promise par la propriété. Les évènements de ces dernières semaines avec des inondations à répétition en témoignent…. Les prix de l’immobilier et les taux d’emprunt sont historiquement hauts et empêchent un certain nombre d’habitants d’accéder à la propriété, car leur salaire n’augmente pas d’autant. De même pour les matériaux et l’énergie. Au regard de ce contexte financier, la revente d’un bien ne signifie plus forcément non plus une plus-value. Des études montrent aussi que la propriété freine l’emploi; on est moins enclin à bouger professionnellement lorsqu’on est propriétaire de sa résidence principale.
Puis nous nous sommes arrêtés sur 2 de façons de devenir propriétaires différemment et à un prix plus abordable pour les ménages : la coopérative d’habitant et le Bail Réel Solidaire. En effet, la coopérative d’habitants permet d’être propriétaire des parts sociales d’une coopérative qui est propriétaire de logements. On récupère ses parts lorsqu’on s’en va et son apport de départ . Le Bail Réel Solidaire, quant à lui, permet d’être propriétaire des murs et de louer le foncier. En effet, c’est le foncier qui prend de la valeur dans une habitation, moins les murs.
La seconde crise évoquée est celle de la qualité du logement. Les études montrent que dans les logements collectifs franciliens en tout cas, les critères de qualité fixés par les architectes n’ont pas toujours été respectés. Ainsi, IDHEAL promeut un certain nombre d’indicateurs que l’on peut regrouper sous 2 catégories : certains qui peuvent dépendre de l’action de l’habitant (performatifs) et d’autres qui sont clairement définis par le concepteur du logement (descriptifs). Ainsi prendre en compte ces critères dans la conception ou la rénovation de logements sont autant d’atouts pour rendre les logements désirables.
Une autre crise est celle du logement refuge de la famille. Mais que devient-il quand e la famille évolue vers plusieurs lieux ? Séparation? Départ des enfants ?… Antoine Pauchon nous propose pour y répondre de taxer l’héritage à des fins de redistribution. En effet, la richesse patrimoniale a doublé en 40 ans (plus que celle liée au revenu). Ce patrimoine est hérité dans 60% des cas. Hors, seul un tiers de la population hérite beaucoup et encore moins sur des patrimoines très importants. Transformer l’image du logement figé peut aussi faire partie des solutions. Concevoir un logement évolutif serait, selon IDHEAL, à valoriser grâce à un bonus à la constructibilité au promoteur qui commercialise ce type de logements, ou encore réduire la TVA à 5.5% pour des travaux d’adaptation ou d’évolution d’un logement. Une autre façon de pallier au logement refuge serait de pouvoir compter sur une culture du vivre-ensemble plus développée gage d’ouverture et de partage, notamment en zone urbaine.
Antoine Pauchon nous a notamment invité à écouter un podcast nommé DESIR que vous retrouvez derrière ce lien : Densité Eprouvée Souhaitée Imaginée Redoutée
Enfin, la dernière crise est celle de la transformation du logement privé en affaire publique. En effet, face au contexte décrit sur la difficulté d’accès au logement abordable et digne, les pouvoirs publiques mettent en œuvrent depuis plusieurs années des mesures pour corriger les effets du marché sur les ménages, comme l’Allocation Personnalisée au logement notamment: 40 à 45 millions d’euros par an dont la moitié au ménages, 20% au propriétaires, 15% aux artisans et 15% aux bailleurs sociaux.
LA QUESTION DU LOGEMENT au prisme des sciences comportementales – Anne Sophie Hacquin, DITP
Les sciences comportementales sont un ensemble de disciplines permettant d’expliquer le comportement humain au travers de ses émotions et de ses automatismes .
La direction interministérielle héberge donc un service spécialisé en sciences comportementales visant à mieux comprendre les comportements pour mener des actions et des politiques publiques plus efficaces. Dans le secteur du logement, il en existe 4 à ce jour:
- une sur les alternatives à la maison individuelle
- une sur le zéro logement vacant
- une sur les pensions de famille
La méthode mobilisée à caque fois s’inspire d’un modèle le COM- B (Capacité, Opportunité et Motivation à adopter les comportements). Elle permet d’identifier les freins et les leviers pour faire évoluer le comportement des personnes impliquer dans les différents projets.
Pour les alternatives à la maison individuelle, on s’aperçoit que tous ancrés dans le modèle pavillonnaire dominant, on projette souvent les craintes des autres sans forcément en vérifier l’exactitude… Ainsi il a été identifié que les actions pour encourager l’adoption de nouvelles formes d’habitat relavait de la mise en visibilité, du soutien aux projets mais aussi de l’inclusion des futurs habitants dans sa conception;
Retrouvez les différentes études ci-contre:


MENAGER PLUTOT QU’AMENAGER LE TERRITOIRE – Rémi Fusari, Fais la ville et Jérôme Harmand, Atelier des Contre vents
Rémi Fusari et Jérôme Harmand nous ont partagé une résidence d’architecture qu’ils ont réalisé à Langon, commune rurale d’Ille et Vilaine.
Ils nous ont parlé de leur envie de répondre à l’enjeu social de densifier la « ville » (entendre village et bourg aussi :)) en partant de l’histoire des lieux et du respect de l’architecture. Ils nous ont confié que c’était avec les habitants que ces choix là s’incarnent dans les communes et durent dans le temps. C’est pour cela que pour eux densité rime avec intensité et peut rimer avec désirabilité. Cette approche revisite la place des habitants bien sûr mais aussi et surtout la place des professionnels de l’architecture et des processus de production de logements rapides et rentables.
Cette résidence s’est organisée en trois temps.
- Temps 1 : Ecouter, parcourir, rencontrer les parties prenantes de la commune et parmi eux les habitants.
- Temps 2 : Mobiliser, rassembler avec une plateforme des imaginaires (socle en bois pour se déplacer dans la commune et aller vers les habitants en les faisant parler des différents espaces)
- Temps 3 : Projeter et incarner dans 3 récits avec des histoires qui parlent, ancrées dans le village
Un des résultats du travail citoyen a été de réussir à projeter de faire venir 10 à 15% d’habitants en plus sur la commune, en 10 ans, sans avoir à recourir à des constructions lourdes en renouvellement urbain. Seulement en s’appuyant sur les initiatives et propositions des habitants et leur expertise d’usage.
Le dernier temps de leur intervention nous a emporté dans l’histoire de 3 habitants de Langon dans 10 ans, quand tous les projets de « ménagement » de leur commune auront été réalisé… Un temps suspendu de poésie qui donne envie d’échanger ensemble pour construire les habitats des Mauges de demain.


Alors ? Qu’est ce qui fait qu’un habitat différent de la maison individuelle sera désirable ?
Selon les intervenants, il sera désirable si :
- il préserve l’environnement en favorisant les matériaux biosourcés et l’économie circulaire
- il est convertible et réversible en fonction des besoins
- il s’inscrit dans une histoire locale et patrimoniale cohérente
- il fait partie d’un travail collectif grâce une pédagogie qui décrypte les enjeux et détricote les idées reçues
- il sera issu d’une concertation et d’une médiation axée sur le gain pour les habitants et le commun du vivre ensemble.
